Le grand désencombrement
Soyons honnêtes, avez-vous déjà vu quelqu'un publier une ode enflammée de plusieurs paragraphes à sa nouvelle bouilloire sur les réseaux sociaux ? Je ne pense pas. Un coucher de soleil depuis une falaise à Santorin, par contre, ou une vidéo floue prise au premier rang d'un concert, c'est une autre histoire. Il semblerait que nous ayons collectivement décidé que le chemin du bonheur n'est plus pavé d'objets, mais d'histoires à raconter. À mon avis, la pandémie n'a fait que mettre ce phénomène en lumière. Après avoir été coincés chez nous, l'attrait d'un nouveau canapé s'est estompé bien vite face au désir brûlant d'être simplement ailleurs, en train de faire quelque chose d'intéressant.
Ce n'est pas une simple observation philosophique. C'est un véritable changement de paradigme économique. Les gens réorientent consciemment leur revenu disponible, délaissant ce qui prend la poussière au profit de ce qui crée des souvenirs. Ce qui me fascine, c'est la durabilité de la chose. Une voiture neuve perd de sa valeur à la seconde où elle quitte le concessionnaire. Un souvenir de vacances mémorables, lui, prend sans doute de la valeur avec le temps. Il devient une partie de votre récit personnel, une monnaie d'échange sociale. Pour les entreprises qui vendent ces expériences, cet attachement psychologique vaut son pesant d'or.